« Enfin, puisque nous sommes en Europe, si près du cimetière qu’est devenue la Méditerranée – et qui rejoint pour moi cet autre cimetière, celui de l’Atlantique, cimetière oublié qui se souvient encore des déchirures de la Traite négrière -, il serait indécent de ne pas convoquer un vaste désir-imaginant du monde, sans doute du monde que nous avons à faire, ouvert, mobile, un monde relationnel vers lequel nous avons tous à cheminer, à l’instar de ces hommes, de ces femmes, de ces enfants qui, jour après jour, se noient dans la honte de vos indifférences, se fracassent au vif de vos frontières, s’écrasant sur vos murs, défiant vos barbelés, épelant les alphabets de l’opprobre, de l’offense, de la mort, dans des eaux soudainement barbares, sur des rives inhospitalières qu’on ne dirait pas civilisées mais que régentent pourtant des lois de la conscience commune. La Méditerranée est un immense sépulcre. On y meurt, on y laisse mourir, on y regarde mourir, on tolère un océan de déchéances imposé à des hommes, des femmes, des enfants et dans lequel, où que l’on soit, où que l’on aille, on se retrouve à patauger sans aucune innocence. Rien de notre actuel niveau de conscience, de nos connexions démultipliées ou de nos transcendances concernant les questions de l’Humain ne parvient à échapper à cela, ni à s’y opposer. Ces migrants nous fixent. Ils nous ordonnent un autre monde que nul ne saurait refuser. »
Nous utilisons des cookies pour nous assurer que nous vous offrons la meilleure expérience sur notre site Web. Si vous continuez à utiliser ce site, nous supposerons que vous en êtes satisfait.OK