Je suis d’une école sauvage.
Maïa Chauvier Mona
Tension maintenue.
Souffle suspendu.
À chaque fois que je tombe, je me retrouve au sommet d’une montagne.
Un jour je suis fugue, un autre exil, un troisième continent de joie, une quatrième contradiction, un cinquième brûlée à la racine.
Un sixième, c’est moi qui crame l’autre ! Tu danses ?
Nous avons toujours soif malgré tous les déserts qu’on nous balance à la gueule !
Le spectacle commence sur un fil et puis il est un paysage miné…
Elle n’existe pas Mona
Elle est un cri de guerre conjugué au féminin
Elle est une écorce brûlée sous les bombardements fratricides
Elle est une mère des disparus à même l’amour sanguin
Elle est ta bouche clouée à la peur, l’ineffable visage d’un génocide
Elle est une folle, une putain, une salope, une taularde, une chômeuse, une camée
Elle est un type à part entre deux tirs groupés
Elle est une brebis égarée aux aguets des foudres ou une gitane
Elle est quatorze millions de morceaux de femmes
Elle est avalanche de doutes
Nécessité de rire affamée
Tout ce que tu redoutes
Ta sensibilité avalée
Elle est ta gueule blafarde sous les néons multicolores et les miroirs
Elle est ta peau maquillée de puces digitales
Elle est mauvaise herbe vomissant les trottoirs
Les exhortations chirurgicales à l’ordre social
Elle est une lèvre bleue vociférant les foules accélérées
Une grande fête ensorcelée
Elle est une insulte échouée dans les filets de l’institution démocratique
Un jeune sur une rue buté par trois flics
Elle est tremblement de visage en hôpital psychiatrique
Elle est un quartier détruit sous les temples des technocrates
L’abondance servile et ses foutues matraques
Elle est une image vide, créature idéologique
Qui paie avec sa peau la valeur de sa santé dans un tombeau
Elle est une envolée cadenassée dans une robe rougeoyante
Elle est la planification de la souffrance
Elle est une poésie morte sur un parking jonché de seringues
Elle est un rêve étranglé dans une corde et sa plainte
Elle est des noms multiples balafrant les nations et leurs frontières
Les braises de 107 papiers destinés à ton cul que te réclament les allocations policières
Elle est le dernier bal tendu vers la lune
Les battements de ton souffle en transhumance
Elle est l’immensité du désir mêlé
Au tumulte du désespoir
Chaque évasion rare
Tu sais, c’est une histoire clandestine, tendre, brutale, ivre
Elle est dans les ventres
Elle te prend à la chaire. Sans partition ;
Elle frappe la terre rouge de ses pieds nomades.
Les yeux dressés vers les étoiles.
Les sonorités logées au cœur de nos étrangetés
Aucune académie phonétique
Des sons…innommables oiseaux migrateurs…
Des mains, pieuvres lumineuses
Elle danse…accrochée au monde
Aux histoires vaincues
Sans aucun certificat d’identité. Elle est une énigme… illuminée par les bûchers