« Restons éveillés /
Aux travailleurs immigrés »
Un poème de Missak Manouchian
« Quand je vois vos visages bronzés
Fouettés sans cesse par le vent et la pluie
Et de vos yeux les songes fluides, la flamme sublime
Votre âme coule dans mon âme. Comment ne pas vous chanter…
Vous êtes venus au monde dans d’humbles chaumières
Les champs immenses ont rempli vos coeurs d’incoercibles désirs
Les montagnes vous ont appris à être fiers, indomptables,
la terre maternelle a rempli vos artères de sa sève féconde.
Mais emportés par la fureur sauvage du simoun
Comme des fleurs arrachées aux buissons qui les portent
Et qui se dispersent au gré du vent
Vous avez tendu votre toile vers tous les rivages de la vie…
Attention, Camarades !… L’ennemi est toujours le monstre
Qui, comme la sangsue ou le ver rongeur,
Boit le sang de nos bras qui peinent sans arrêt
Telle une hyène prête a tout dévorer.
Sous le masque de la foi il verse à ses victimes
Le poison de la corruption et de l’ignorance
Et, semeur de mensonges et de haines raciales,
Il attire des foules les passions criminelles.
Que les flambeaux de la conscience éclairent vos esprits !
Que le sommeil et la lassitude ne voilent point nos âmes !
A tout moment l’ennemi change de couleur et de forme
Et nous jette sans arrêt dans sa gueule inassouvie.
Restons éveillés, ô camarades héros du travail
Les ténèbres nous guettent pour nous engourdir
Que la haine croisse en nos cœurs avec une sourde colère
Attisons en nous le feu de la lutte des classes. »
Missak Manouchian